mercredi 1 octobre 2008

Le contour de toutes les peurs (Jury 2009 des collégiens)

Le contour de toutes les peurs de Guillaume Guéraud, aux éditions du Rouergue (doAdo Noir).

Alistaire vient de m'envoyer un mail pour que j'ouvre une page pour elle : elle a envie de partager cette lecture avec vous. Je présenterai le livre plus tard. En attendant, voici donc son commentaire.

Cliquez sur le titre de l'article... C'est par là que la discussion continue.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Je viens de finir "Le contour de toutes les peurs" de Guillaume Guéraud. Il fait partie de ces quelques auteurs dont je vérifie, chaque fois que je passe dans une librairie (soit une fois par semaine...) s'il n'a pas publié un nouveau roman. Tout en sachant qu'il ne peut écrire aussi vite que je le lis... Mais je regarde tout de même... Sait-on jamais ?
J'ai quasiment tout aimé de lui, mais j'ai franchement craqué sur "La brigade de l'oeil" et sur "Je mourrai pas gibier". Je les conseille en permanence à mes élèves. Enfin, à certains. Aux bons lecteurs, aux courageux qui ne font pas la grimace devant les 400 pages des "Brigades", à ceux qui, comme moi, n'aiment pas les happy end tirés par les cheveux. Marre de ces romans où le héros survit à tout. Pourquoi se confronter à la mort, la peur, la haine, l'injustice dans un roman serait-il néfaste à un ado ?
Revenons à nos moutons... Justement, de la peur, il y en a dans "Le contour...". La peur de Clément lorsqu'il se retrouve face à inconnu qui sent la haine. Celle des parents, exprimée différemment, qui craignent, rétrospectivement, pour leur fils. La peur de cet homme, face à ce qu'il est et pourrait faire. Oui, ça peut paraître étrange mais cet homme aussi m'a touchée. Il est seul, il a perdu sa femme et sa fille et cherche un coupable. En l'occurrence, la mère de Clément, avocate. Cet homme frappe Clément, mais en même temps, ne veut pas sa mort. Comme l'impression que l'agression de Clément, que sa déclaration au procès ne sont que des façons d'être condamné plus lourdement, qu'il espère la prison afin de se délivrer du souvenir de sa fille.
Contrairement aux autres romans de Guéraud où je regardais vivre les personnages, dans ce roman-ci, je me suis identifiée à Clément, j'ai ressenti cette peur quand il découvre cet intrus qui saccage son intérieur. Quand il devine sa violence. Quand il comprend que leur tête à tête risque de durer.
Comme Clément, quand je perds pied, qu'une situation me dépasse, des idées absurdes occupent mon esprit. Clément qui "face à un fou furieux a un seul truc qui [le] préoccupe, c'est qu'[il] ne [se] rappelle pas le nom du réalisateur" de "Charlie est ses drôles de dames"... J'ose pas vous raconter ce à quoi je pense, c'est trop ridicule ;-)
L'auteur a mûri, l'écriture reste tranchante, mais elle est plus ciselée. Les émotions ne nous sont plus jetées à la face mais elles font leur bonhomme de chemin dans notre tête, de façon beaucoup plus insidieuse. J'ai aimé, j'aime ce livre.

Djoz a dit…

Ce qui est certain, c'est qu'on ne peut que se souvenir d'une telle histoire. Guillaume Guéraud, c'est vraiment de la dynamite et la discussion sera très probablement animée pour déterminer si nous allons proposer ce livre au jury des 4e et 3e.
Qui en seraient les plus bousculés ? Les enseignants ? Les ados ? Les parents ? Si nous sommes réalistes, nos jeunes ont vu bien plus violent côté cinémathèque. Si nous sommes réalistes, cette mésaventure ne peut arriver qu’à un nombre très limité de personnes. Si nous sommes réalistes, nous acceptons l’idée que nos peurs s’enchaînent –les grandes effaçant les petites- les grandes s’installant au fond des tripes pour ressurgir dans un détail qui réactive nos mémoires. Il faudrait accepter que la peur impose nos limites. Accepter la peur comme une expérience. Discuter de ses diverses formes, celles qu’on choisit dans la montée d’adrénaline pour se sentir vivant, celles qu’on subit parce qu’on est au mauvais moment au mauvais endroit, celles qui nous semblent irrationnelles, remontées de notre mémoire collective…
Mais est-ce la peur, en fait, qui pourrait déranger dans l’histoire ? Ou plutôt, la violence. Celle qui semble absurde pour qui la subit. Celle qui semble incontrôlable pour qui la répand. Celle qui explose quand on n’a pas la maîtrise des mots et des sentiments. Celle qu’on utilise comme une arme pour dominer.
Compliqué d’être humain, hein ? Difficile d’admettre que nous ne sommes pas les Dieux immortels qu’on nous présente depuis la naissance de notre petite personne ?

La vraie question qui se dégage de cette lecture -qui va être certainement se débattue dans l’association- est en fait de savoir si -comme Guillaume Guéraud- nous, adultes, nous voulons tendre à nos jeunes le miroir de ce que nous sommes.